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Le jour de la Célébration est arrivé. Les Crochus, ou Vagabonds comme ils aiment s’appeler, sont les vedettes de la fête. Une jeune scientifique ne se laisse pas duper : elle est persuadée que cette communauté est liée à un culte du sang, comme cela arrive chez les vampires. Ses recherches vont la mener sur la route d’un petit garçon intrigant, entre les pattes de bêtes monstrueuses et vont la plonger dans une enquête aux mystères plus étranges que ce qu’elle n’aurait jamais imaginé.
Avec ou sang (Partie 1)
Je n’arrivais pas à m’habituer à cette dentelle qui courait le long de mes bras. Je me grattais sans cesse et regrettais amèrement d’avoir écouté ma mère et ses règles de bienséance. De plein jour, la ville ne me donnait pas très envie. Nous marchions tous à découvert et chacun pouvait émettre des jugements sur l’autre. Cette promiscuité me mettait mal à l’aise et porter une robe à la mode ne m’aidait en rien. Je ressemblais à une jeune femme bien sous tous rapports, une dame sérieuse de la haute société, ce que je n’étais pas du tout en mon âme intérieure. Pour le jour de la Célébration, la première édition, j’avais fait un effort et mis de côté mes sempiternels pantalons confortables.
Mes yeux vifs examinaient et récupéraient le maximum d’informations. Je n’aimais pas les surprises et me prémunissais de toutes rencontres indésirées. La rue grouillait de monde. Nombre de groupes d’hommes en costumes me passèrent devant en me jetant des coups d’œil malsains. Ils devaient sortir de l’université Maria Richtij, comme le soulignait l’écusson et les couleurs de leur cravate. Je me souvenais parfaitement de mes années à étudier les sciences dans cette faculté et un sourire illumina mon visage. J’y avais passé d’excellents moments et m’étais parfaitement intégrée. Parmi l’une des rares filles ayant choisi la filière d’hématologie, je m’étais également fait des ennemis qui ne voyaient pas d’un bon œil que je pose autant de questions et que je m’intéresse à des sujets aussi délicats.
Un couple riait aux éclats à quelques pas et je les entendais discourir sur les prochains spectacles qu’ils iraient peut-être voir. La félicité qu’ils affichaient me rendait jalouse. Leur vie semblait simple alors que la mienne manquait cruellement de sens. Je passais mes journées à vouloir comprendre le sens de mon existence et celui de mon univers. La joie et le bonheur m’avaient désertée il y avait longtemps. Je m’étais promis de ne plus penser à ce qui m’était arrivé mais je n’y parvenais pas. Dès que je me levais, toutes mes pensées se focalisaient sur ces êtres étranges.
Je continuai de marcher, seule sous ce soleil brûlant. Suspects, tous ceux que je croisais ne m’inspiraient aucune confiance. Très bien habillés pour la plupart, ils me faisaient me sentir tout de même moins idiote avec ma petite robe noire et mon châle. Je me fondais parfaitement dans la foule et je remerciai ma mère en silence. Des groupes d’enfants me bousculèrent et je me retournai furibonde. Ils s’extasiaient sur le dernier comics qui venait de sortir et ne m’avaient pas vue. Je ne l’avais pas encore lu et je devais me dépêcher si je ne voulais pas que l’on me gâche la fin. On m’en avait dit du bien et j’avais hâte d’enfin découvrir les mystères de Old City et de ses habitants.
Des sièges avaient été disposés en ligne devant une grande estrade et nombre d’entre eux étaient déjà occupés. Ma mère devait fermer la boutique et arriverait à la dernière minute. Elle m’avait dit de lui réserver un siège tout près de la scène pour admirer notre maire et le chef de la communauté des Crochus. D’ailleurs, je n’en voyais aucun nulle part et m’interrogeai. Mes sens aiguisés m’avaient-ils quittée ou ces êtres se cachaient-ils ? Nous vivions pourtant ensemble depuis quelques temps à présent, même si la cohabitation ne semblait pas du goût de tout le monde au vu des commentaires déplaisants que j’entendais régulièrement.
Ils se nommaient eux-mêmes les Vagabonds mais nous les appelions les Crochus à cause de leurs nez immonde comme ceux des sorcières et leurs yeux immenses et globuleux comme ceux de monstres. L’imaginaire de l’humanité n’avait décidément pas de limite et nous n’étions pas en reste. Ils nous avaient expliqué avoir été expulsés de leur communauté et vouloir trouver refuge. Leur maladie de sang les affaiblissait et leur posait de nombreux problèmes.
Ils effrayaient ceux qu’ils côtoyaient et avaient été rejetés. Notre petite ville avait été si émue à l’époque. Je me souvenais encore des yeux attendris et des exclamations dramatiques. Ils nous avaient demandé de leur fournir du sang pour leur survie afin d’effectuer régulièrement des transfusions et s’étaient excusés à maintes reprises. Scientifique et passionnée par ce domaine, je les plaignais. Les maladies de sang, les hémopathies comme on les appelait aussi, nécessitaient des soins quotidiens de part un dysfonctionnement dans la production du sang ou de certains de ses éléments.