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Que peut-on faire d’une sirène rebelle ?
La princesse de la mer (Partie 2)
Elle avait une malice dans le regard qui n’échappa pas à Kyria, et qui la fit éclater de rire. Puis elles partirent. Au début, Ida fut impressionnée par tout ce qu’elle voyait et, de sa main libre, contenait les « oh ! » et les « ah ! » de sa bouche. Kyria commentait, les baleines, les différents types de requins, les crustacés… jusqu’à ce qu’elle s’aperçoive qu’elle avait faim. Alors elle attrapa, à la main, quelques sardines, qu’elle croqua, puis mit Ida sur son cœur, et la petite eut sa tétée. Kyria s’était installée confortablement sur un rocher où poussaient de longues algues, puis y allongea son bébé, après le rot d’usage et sa bulle. Elle l’entoura de ses bras, et s’endormit elle aussi. Ida se réveilla la première, battit des bras.
– Rigolo !
Les algues s’étaient entremêlées dans la longue chevelure brune de Kyria, alors la petite se mit en devoir de coiffer sa mère. Ses cheveux à elle étaient plus courts, plus clairs aussi, et elle s’en moquait. Mais la beauté de sa mère la subjuguait, elle la petite sirène. Puis, par souci du détail, elle voulut ajouter un coquillage dans la coiffure compliquée qu’elle lui avait faite, mais la bestiole protesta, libérant de petites bulles, et là-dessus Kyria s’éveilla, voulut lever la tête.
– Aïe !
– Maman ! ‘a te plaît ?
– Quoi d… aïe !
Et elle porta une main à sa tête.
– Nom de nom !
Ida comprit alors sa bêtise : les algues tenaient toujours au rocher ! Et elle eut peur et se mit à pleurer. Alors Kyria tira la tête un grand coup, s’arrachant la moitié des cheveux.
– Ida ! fit-elle d’un ton réprobateur.
C’était bien la première fois qu’une de ses filles lui faisait un tour pareil. Et en voyant sa mère ainsi, les pleurs d’Ida redoublèrent. Kyria ne savait plus si elle devait la consoler, ou se fâcher. Elle eut un soupir d’agacement, lui prit la main le plus doucement possible, et déclara qu’elles repartaient immédiatement, après un « et ne me fais plus jamais ce coup-là, compris ?! ».
– Je te trouvais jolie, mam… man, dit seulement Ida, pressant sa main dans celle de Kyria.
– Changement de programme : je vais chez le coiffeur. En plus, comme ça tu verras du monde.
La maman sirène était si contrariée, qu’elle ne dit presque rien tout au long du trajet. Toutes deux allèrent à l’épave d’un vieux bateau, et le marin qui les accueillit regarda drôlement Kyria.
– Je sais, dit-elle d’un ton tranchant. Je viens de donner la vie à cette petite chipie. Elle s’appelle Ida.
– Mais je ne vois pas… commença le marin.
– Ne pose pas de question, Alfredo. Je compte sur toi pour rattraper le coup de sa première grosse bêtise. Je n’attirerai personne dans les mers avec une telle coiffure.
Alfredo hocha la tête, dit à Ida de s’asseoir, et passa ses mains dans la chevelure de Kyria. Des bouts d’algues tombèrent encore.
– Il faut que je te fasse des extensions, Kyria.
– Fais ce qu’il faut, dit-elle en soupirant. Mais si ça doit prendre du temps, je préférerais qu’il y ait quelqu’un pour occuper Ida en attendant. Tu es seul ?
– Non. Je vais appeler mes mousses.
Peu après, deux jeunes garçons apparurent, et Ida regardait leurs jambes, fascinée.
– ‘est quoi, ça ? leur demanda-t-elle.
– On va t’expliquer. Je m’appelle Mustafa, et voici Justin.
– Oui, racontez-lui des histoires, approuva Kyria. Mais ne vous éloignez pas, ça ne fait pas longtemps qu’Ida est née.
– Donc tu t’appelles Ida ? fit Justin.
– Vi. Euh, oui.
– Montrez-lui ce bateau, et racontez-en l’histoire, suggéra Alfredo. Moi, j’ai du travail. Viens, Kyria, nous allons dans la cabine du capitaine.
– Merci.
– Mam ! s’inquiéta Ida en les voyant s’éloigner.
– Ne t’en fais pas, je ne suis pas loin.
– Ze ne le ferai pus.
La petite sirène en aurait encore pleuré, devinant la véritable cause du retrait de sa mère. Mustafa eut pitié d’elle, et la prit par la main.
– Viens, Ida.
Il lui embrassa aussi une joue, puis Ida suivit les deux garçons, en nageant.
Chacun prit son temps, et tous se retrouvèrent devant le miroir que tendait Alfredo à Kyria. Celle-ci eut un grand sourire en voyant le résultat, et Ida nagea vers le miroir.
– Des sirènes ! fit-elle.
– C’est toi et moi, mon petit poisson. Touche-le.
Enfin, Ida comprit, et Kyria se confondit en remerciements pour Alfredo. Et toutes deux repartirent dans les profondeurs.