Le chant de la mer (Partie 3)

Le chant de la mer

Catégorie : Fantastique/Merveilleux

Auteur : Chiaramarino

Résumé : A un tournant de sa vie, Patricia découvre les profondeurs de l’océan…

 

 

Le chant de la mer (Partie 3)

– Elle est mûre, je dirais, fit Séphélios. En plus, notre amie nage comme un poisson.
– Mais qui sont tous ces gens ?
– Des professeurs. D’autres qui veulent se cultiver. Nous sommes très ouverts, expliqua Tatiana. Nos petits naufragés, et nos petits à nous, ont encore tout à apprendre !
– Il y a donc des écoles dans le fond des océans ?
– C’est notre monde. Peut-être aussi le vôtre, qui sait ? Si vous êtes portugaise, vous avez un rapport intime avec la mer, dit doucement Séphélios.
– Oh…
Un chant s’éleva de la poitrine de Patricia, très doux. Un fado entendu quand elle était petite.
– Vous connaissez le chant de la mer, à ce que je constate. La mer qui prend. Ou qui donne. Votre chant est un très beau chant, jugea Tatiana.
– Ça fait longtemps que je n’ai pas chanté. Et je n’en ai guère envie… je viens de perdre ma mère. Seul ce fado me revient… Et il y a cette chanson, È doce morrer no mar, qui est si belle et si triste…
– Votre mère est morte en mer ?
– Non. D’un cancer. Mais elle aimait beaucoup la musique. Brésilienne, cap-verdienne…
– Vous aurez besoin de notre soutien alors, dit encore Tatiana. Vous pourrez, à tout moment, converser avec nous. Aller, revenir… cette dimension est la vôtre. Qui sait, peut-être même trouverez-vous quelqu’un parmi nous. Regardez ces livres, vous en mourrez d’envie.
– Et pour connaître ce monde ?
– Nous avons des genres de villes. Nous dormons dans les coquilles des autres, comme les bernard-l’ermite. Ce ne sont pas les épaves qui manquent. Mais je vous conseille de rentrer chez vous, pour digérer toutes ces nouveautés, conseilla Séphélios. Vous pouvez plonger dans la vague de Figueira da foz.
– Je… je vais fouiner dans ces bouquins. Et après, je rentrerai chez moi.
– Attendez. Vous venez de perdre quelqu’un de cher, et je suis, nous sommes, les esprits de la mer, fit Tatiana, et elle vint serrer Patricia dans ses bras, qui en eut un soupir d’aise.
– Merci, dit-elle quand les deux femmes desserrèrent l’étreinte.
Le sang perla de nouveau sur le doigt de Patricia. Elle comprit qu’elle s’était blessée sur l’aileron de Tatiana.
– Ce n’est rien. Vous avez votre sang dans la mer. Digne Portugaise ! Allez-y, découvrez cette bibliothèque.
Patricia ne se le fit pas dire deux fois.
Quand elle voulut rentrer chez elle, elle l’indiqua à Tatiana, qui était restée au milieu des livres.
– Tout est passage ! Allez sur le pont, et donnez un grand coup de reins pour vous propulser. La vague comprendra.
– Ne peut-on parler à l’océan ?
– Si. Mais pour cela, il faut que vous reveniez. Et vous l’apprendrez auprès de nous.
– Alors je reviendrai.
– Pour moi aussi ? Vous êtes… belle, dit une voix d’enfant.
Patricia baissa le nez, sur un enfant couvert d’algues.
– C’est un de mes petits protégés, Martino, expliqua Tatiana. Ce n’est pas une raison suffisante, mon petit poisson. Et Patricia veut d’abord apprendre sur nous.
– J’ai raté une existence d’humain…
– Ne t’inquiète pas, je te raconterai. A bientôt, Martino, Tatiana !
– Au revoir Patricia !
Patricia eut un sourire, salua rapidement la compagnie, et remonta sur le pont pour suivre les indications de Tatiana. Elle émergea de la vague, et retrouva ses vêtements. Elle se rhabilla, ramassa la bouteille avec le message, et rentra dans la maison familiale, où elle était seule. Elle prit alors une douche rapide, puis attrapa son téléphone.
– Hugo, je voudrais te parler.
– Qu’y a-t-il ? Où es-tu ?
– A la maison. Je voudrais la garder.
– Quoi ? Mais…
– C’est mon seul lien avec le Portugal. Tu peux comprendre, non ?
– Oui… oui, bien sûr. Mais nous sommes deux, là-dessus. La nuit porte conseil, tu sais. Attends demain, avant de prendre une telle décision.
Patricia jugea le conseil raisonnable, et ne discuta pas. Mais le lendemain matin, dès la première heure elle enfila son maillot de bain, prit des affaires de plage, et fila vers l’océan. Il fallait qu’elle en ait le cœur net.

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