Stellio (Partie 2)

Avertissement : déconseillé aux moins de 16 ans.

Avertissement : déconseillé aux moins de 16 ans.

Catégorie :

Aventure/Action

Auteur :

Ericlelab

Résumé :

Un homme s’interroge sur sa solitude, sur la solitude des êtres.

Avertissement : déconseillé aux moins de 16 ans.

Stellio (Partie 2)

Elle avait organisé une petite réunion après la cérémonie, Ida. Elle avait préparé avec ses parents trop présents de la charcuterie et du fromage avec du vin frais. Il y avait aussi du café et de la brioche. Je regardais les gens, notamment les femmes boire le café. Tous le remuaient de la même façon : de gauche à droite, puis de droite à gauche puis tapotaient la petite cuillère sur le bord de la tasse avant de la lécher. Je n’aime pas tellement les conversations autour d’un café. Elles semblent obligatoires et sont souvent à la fois vides et pesantes. Elle était fatiguée et frileuse, Ida. Elle était assise. On se débrouillait tous pour se servir et après avoir parlé un peu de Stellio, on se mit à parler un peu de la ferblanterie, un peu de la chasse, un peu du temps, un peu de la crue de la Serio dans un village voisin, un peu de tout pour mieux parler de rien. Les parents de Stellio étaient morts depuis quelques années, discrètement, humblement comme leur vie. Ils sont nés, ils ont travaillé beaucoup, un peu vécu, un peu aimé, un peu ri puis ils ont été fatigués et ils sont morts à quelques semaines d’intervalle ; elle d’abord sans que l’on sache vraiment de quoi. Et lui. « Mais que va-t-il devenir, Sandro, sans Héléna ? ».

Je suis rentré ensuite avec mes parents chez eux pour dîner avant de repartir chez moi. Mon père m’a vaguement demandé ce que je pensais de tout « ça ». Je crois que je lui ai dit à peu près ceci :
« Stellio ne semblait plus exister pour personne, alors, il a mis fin à son existence, une sorte de prolongement de ce qu’on lui imposait. Une part active de l’abandon, de l’indifférence qui le détruisait. Il a préféré aller plus vite pour ne plus souffrir. Enfin, quand je dis préféré… »
J’ai regretté d’avoir parlé ainsi, j’aurais mieux fait de rester dans les banalités d’usage. Je n’ai pas su s’il a réellement compris ce que je voulais dire, une sorte de moue et un long soupir ont servi de commentaire. Mais il était ému, tout comme ma mère car c’était un homme du village qui venait de partir, cela aurait pu être moi pensaient certainement mes parents. Et puis, ils connaissaient ses parents alors, ils devinaient leur chagrin.

Je suis parti après le sempiternel café d’après repas, café que je ne prenais pas d’ailleurs. Je suis rentré chez moi, dans mon petit appartement. Comme Stellio, je n’avais pas d’enfant, mais moi, c’était différent : je vivais seul depuis longtemps. J’avais vécu quatre ans avec Stéphania et puis comme j’existais de moins en moins pour elle, elle est partie. Comme ça, je n’existe plus du tout pour elle.

« Quand je serai mort, pensez joliment à moi car je ne méritais pas ça. ». Je me suis mis à réfléchir à cette phrase. Je réfléchis toujours mieux quand je suis allongé. Que voulait dire Stellio avec son « ça » ? De vivre comme il a vécu ou de mourir comme il est mort ? De ne pas vivre ce qu’il voulait vivre ? Peut-être était-il très malade ? Non, je crois qu’on l’aurait certainement su et puis ce mot qu’il nous a laissé ne va pas dans cette interprétation. Alors ? Il est très puissant son message, il enferme beaucoup de choses dans un texte si court. À qui a-t-il caché son désarroi ? À qui a-t-il menti à ce point ? S’est-il menti à ce point à… lui-même ? A-t-il menti au petit garçon qu’il était et qui plaçait tant de bonheurs futurs dans la vie ? Il était donc si fatigué ? De qui ? De quoi ? Il n’avait pas d’enfant Stellio, s’il en avait eu, peut-être que ça l’aurait retenu. Moi je pense que si j’en avais, ça me retiendrait. Mais alors ?

Moi, par contre, je me suis senti d’un coup épuisé et je suis tombé dans le sommeil sans passer par ce moment que j’aime tant où le réel et l’imaginaire sont délicieusement miscibles. Non, je suis tombé dans un sommeil lourd dans un premier temps mais peuplé de cauchemars, ce dont je m’attendais car je connaissais la fragilité de mon sommeil.

Le lendemain, c’était dimanche. Je ne suis pas allé chez mes parents, j’y étais la veille. J’ai traîné une sorte de mauvaise fatigue toute la journée, comme un début de grippe. Je me suis rendu compte que j’étais triste, je crois même que j’ai un peu pleuré. Puis après, je ne pleurais plus mais j’avais une boule coincée douloureusement dans ma poitrine. Comme si ça m’asphyxiait. Et ça me transperçait très violemment. J’étais triste et fatigué et j’avais très peur aussi. Parce que je ne mérite pas ça non plus.

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