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Résumé : Ylsiirha est une jeune fée qui vit en symbiose avec son porteur, Arthur. Son physique lui déplaît tant qu’elle ne parvient pas à s’accepter. Son reflet l’insupporte et son souhait le plus cher est de ressembler aux créatures féeriques des contes pour enfants.
Quand le Conseil Fée-des-Rahl la convoque, Ylsiirha prend peur, sans se douter que ses complexes pourraient peut-être la sauver et lui offrir le destin dont elle rêve vraiment.
Un monde par fée (Partie 9)
Je n’ai plus de voix. Je ne m’étais jamais ouverte autant à quelqu’un et l’émotion me happe. Mon cœur vibre et bat à cent à l’heure. Figée, je reste un instant devant mon image qui me hante. Je n’entends pas le Fée-Gnant poser une main sur mon épaule. Il me soutient et m’aide à m’asseoir sur la chaise face à son bureau. Il ne paraît pas soucieux et garde un air très professionnel. Sa discrétion est bienvenue. Il lit ses annotations et me regarde droit dans les yeux.
– Ce n’est pas grave Ylsiirha. Vous finirez par vous accepter telle que vous êtes et telle que l’on nous a faits. Nous passons tous par cette étape. Nous sommes beaux, quoiqu’on vous dise. Bientôt, vous le saurez et vous y croirez.
Je m’affaisse sur moi-même, fébrile. Ses mots, bien qu’attendus, me vont droit au cœur et me tranquillisent. Je ne suis donc pas la seule à souffrir de ces maux et cela me rassure plus que je n’y aurais pensé. Huiljigh me félicite pour mon courage et m’accompagne jusqu’à une porte reliée à l’autre côté du palais. Des Fées-Roces m’y attendent et me font signe de rejoindre mes autres camarades ayant aussi passé la séance médicale. Bien étrange, cette dernière me laisse une drôle d’impression. Les questions du Fée-Gnant ne m’ont pas paru très pertinentes.
Quelques minutes plus tard, les dernières fées passent les portes et nous nous mettons en marche. Le groupe me paraît plus petit que tantôt et je ne vois plus Clérila. Je ralentis le pas et regarde tout autour de moi. Où est-elle passée ? Un garde me bouscule volontairement pour que je reprenne le rythme et je lui lance un regard noir, avant de me rendre compte de mon erreur. Il agrippe violemment mon poignet et je me retrouve à marcher à son côté sans pouvoir me dégager, emprisonnée. Je bous intérieurement et me mets à le haïr de toutes les forces qui me restent.
Devant le palais, libérée de l’étreinte mortifère, je dis au revoir à tout le monde et précise que je ne viendrai pas pour la célébration de ce soir. Mon hôte se lève tôt pour prendre le bus et j’ai besoin de me régénérer après toutes ces émotions. Les Fées-Roces et Fées-Longs respectent nos embrassades, même si je ressens leur impatience. Je demande à tous ceux que je connais s’ils n’ont pas revu Clérila. Leurs visages navrés et leurs regards interrogateurs me répondent d’eux-mêmes. Avec trois de mes camarades, je m’installe sur une souris qui nous transporte en bas des marches. Je me perds dans mes pensées le long du trajet et pense à Arthur. Le retour en harfang, avec un Neejil apathique, ne me fait pas autant rêver qu’à l’aller tant ce qui vient de se produire me trouble. Le Fée-Long me ramène jusqu’à la fenêtre et m’aide à l’ouvrir avec sa magie. Je le remercie d’un signe de la tête et le regarde s’envoler sur son rapace élégant. J’aimerais tant acquérir un Fée-Folet pour voyager chaque nuit et me sentir libre.
Arthur dort toujours et ne semble pas dérangé par les bruits de l’oiseau. Ravie, je m’allonge près de lui et me mets à le regarder. J’adore ses cheveux bruns qu’il s’applique à coiffer tous les matins en y mettant de la cire, et je fonds complètement devant ses tâches de rousseur qui me rappellent mon Amanda. Je me sens entière à ses côtés et finis par m’assoupir, ressassant les événements de la journée. J’espère que Clérila est indemne et qu’elle n’est pas restée au palais pour y souffrir d’y avoir mécontenté le Fée-Gnant ou le Conseil. La faim me fuit et je secoue négativement la tête quand des gens de mon coven se positionnent devant la fenêtre pour venir me chercher afin d’aller chasser.
Quand l’aurore pointe le bout de son nez, j’arrête d’admirer mon jumeau et entame le rituel pour m’abriter près de son cœur. Je pose délicatement mes mains sur sa peau et prie la Mère des fées de bien vouloir me donner sa bénédiction. Sans elle, ma magie me serait confisquée. Mes doigts s’illuminent et je remercie la Mère de m’avoir bénie. J’appuie petit à petit et me sens entraînée comme dans un maelström. La tempête se déchaîne et tout mon être tremble dangereusement jusqu’à ce que je me stabilise dans un environnement que je connais bien et que je peux appeler fièrement mon chez moi. La pulsation des veines me transperce avec force et me ravit. Ce rythme régulier tranquillise mon âme éprouvée. Les pensées d’Arthur me parviennent et je sourie aux angoisses de mon protecteur face à la belle Julie qui l’intimide au collège. Demain, il se réveillera en forme et réussira tout ce qu’il entreprendra, je le sais.