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Il me fallait une nouvelle identité…
Usure, passion d’identité (Partie 2)
Le lendemain, j’ai tenté d’en apprendre plus sur ce type, mais je n’ai rien trouvé. Personne ne le connaissait. Il n’était même pas dans les registres préfectoraux. Ce Jean Gryphler était totalement inconnu juridiquement. Mais alors, comment pouvait-il posséder une carte d’identité ?… Comprenant que je ne pourrais rien faire avec cette foutue carte, j’ai décidé de la jeter en allant chercher à manger. Je l’ai donc déchirée et jetée dans la poubelle en bas de chez moi. Je me suis dirigé vers le kebab. Je ne connaissais pas le cuistot qui servait les sandwiches ce soir-là, mais ils pouvaient changer parfois donc je ne me suis pas posé de questions. Il m’a alors souri lorsque je suis entré, et m’a dit : « Bonjour Jean Gryphler, comme d’habitude aujourd’hui ? ». Cette question m’a glacé le sang. À savoir que je m’appelle Dorian… J’ai répondu : « Moi c’est Dorian ». Mon interlocuteur a souri puis m’a servi le sandwich. J’ai pris mon kebab, et suis rentré chez moi. Arrivé sur le palier, j’ai sorti ma clé et ce qui s’est passé doubla les battements par minute de mon cœur… Elle ne rentrait plus. J’ai levé les yeux, vu le numéro de l’étage. Il me restait un étage à monter. Je suis entré dans mon appartement… Et j’ai entendu la télévision allumée. Je ne l’avais pas allumée depuis mon départ pour la grand-place où j’avais commis mon méfait. Je me suis donc rendu dans le salon, et ce que j’ai vu retourna littéralement mon cerveau… Un jeune homme était avachi dans le canapé, et regardait un vieux film, type années cinquante. Le plus surprenant, c’était que les mêmes trente secondes d’images repassaient en boucle. On y voyait un homme déambuler dans sa maison, mais comme s’il n’avait plus aucune conscience. Ses pas étaient lents et hasardeux, son visage et son regard vides comme si son esprit n’habitait plus son corps. Mais le pire, c’est lorsque le jeune homme assis dans mon canapé tourna lentement la tête vers moi. Me sourit de toutes ses dents et me dit : « Bonjour Jean Gryphler, vous avez perdu ça. ». Il me lança ce qui ressemblait à une carte. Il s’agissait de la carte de ce foutu Jean. À ce moment-là, c’était comme si quelqu’un avait mis un coup de perceuse dans mon estomac. Mais le pire ce n’était pas la carte. C’est que ce jeune homme dans le canapé… C’était moi. Je suis allé dans la salle de bains, me suis mis devant le miroir, mais ce n’est pas mon visage que j’ai vu… J’avais du mal à le reconnaître mais je savais que je connaissais ce visage. Et puis j’ai compris. Ce visage. Cette identité qui me rendait fou depuis bientôt vingt-quatre heures. Je ne comprenais pas ce qui se passait, mais je comprenais que cela m’effrayait comme jamais je n’ai ressenti de frayeur auparavant. Je suis retourné dans le salon, en rage, et j’ai tenté d’attraper ce jeune homme par les épaules… Mais je n’en avais pas la force. C’est comme si mes doigts étaient devenus du papier.
Je suis sorti de mon appartement et suis allé brûler cette carte loin de la ville. J’ai pris le bus, jusqu’au bout de la ligne et ai marché dans un sous-bois, longtemps, jusqu’à un endroit que personne ne trouverait. J’ai déchiré puis brûlé cette maudite carte d’identité. Criant et hurlant : « Brûle, et ne reviens plus jamais ».